Après quinze années consacrées à la promotion de la photographie comme outil de dialogue et de réflexion critique, la Fondation des Artistes Africains (AAF) annonce une évolution majeure : le Festival LagosPhoto adopte désormais un rythme biennal.
Sa première édition sous ce nouveau format se tiendra du 25 octobre au 29 novembre 2025, avec une programmation ambitieuse placée sous la direction artistique d’Azu Nwagbogu, fondateur de l’AAF.
Un thème puissant : l’incarcération sous toutes ses formes
Pour cette édition inaugurale, LagosPhoto interroge le thème « Incarcération », explorant les dimensions visibles et invisibles de l’enfermement. La biennale mettra en lumière les multiples formes de captivité – physiques, psychologiques, idéologiques ou spirituelles – qui pèsent sur les individus et les communautés. L’exposition s’intéressera autant aux prisons concrètes qu’aux barrières intérieures, ces « cages » invisibles qui conditionnent les choix, les rêves et la conception même de la liberté.
La photographie, longtemps instrument de surveillance et de contrôle, sera ici questionnée dans sa double fonction : outil de domination mais aussi levier d’émancipation. Des archives coloniales aux mouvements de résistance, LagosPhoto 2025 entend montrer comment l’image peut à la fois servir et contester les systèmes de pouvoir.
Une programmation éclatée entre Lagos et Ibadan
Pour la première fois, LagosPhoto déploie sa programmation sur quatre lieux entre Lagos et Ibadan. À Lagos, trois espaces phares accueilleront les expositions : la Fondation des Artistes Africains (AAF), qui rouvre ses portes après deux ans de rénovation, la galerie Nahous, installée dans l’historique Palais fédéral, haut lieu des célébrations du FESTAC 77 et de la signature de l’indépendance du Nigéria, le Parc de la Liberté, ancien site de la première prison coloniale, aujourd’hui reconverti en espace public.
À Ibadan, le New Culture Studio, conçu en 1970 par Demas Nwoko, mettra en avant des œuvres explorant les dimensions urbaines et architecturales de l’enfermement. D’autres lieux satellites, tels que le musée Didi et l’Alliance Française de Lagos, accueilleront également des expositions et installations.
Des artistes et des œuvres au croisement des disciplines
La biennale présentera une vaste sélection d’artistes issus d’Afrique, de sa diaspora et de scènes internationales. Les propositions couvrent photographie, film, installation, textile, sculpture, son et archives, tout en expérimentant des supports hybrides et des techniques ancestrales ou numériques.
Parmi les artistes invités : Ayobami Ogungbe, qui tisse les émotions du déplacement et du déracinement, Geremew Tigabu, qui évoque des paysages hantés par les conflits, Cesar Dezfuli et Stefan Ruiz, dont les portraits interrogent les réalités carcérales et migratoires, Yagazie Emezi, qui convoque la mémoire ancestrale à travers les textiles et les rituels, Nuotama Bodomo, qui déconstruit les récits coloniaux par le cinéma afro-autochthonique, Shirin Neshat et Sharbendu De, qui abordent respectivement la violence politique et les spéculations sur la crise climatique.
Ces œuvres questionnent la mémoire, l’identité, l’écologie, la migration et la résistance, tout en révélant la photographie comme un espace de liberté, de contrôle et de réinvention narrative.
Ce passage au format biennal offre à LagosPhoto un temps de réflexion plus long, permettant des recherches approfondies, des dialogues intertextuels et des expositions à échelle variable. Tout en s’appuyant sur quinze ans d’héritage, la biennale ouvre un nouveau cycle consacré à l’expérimentation et à la pensée critique.
Soutenue par le ministère nigérian des Arts et du Tourisme, National Geographic, Canon, l’Open Society Foundations et la galerie Nahous, LagosPhoto 2025 confirme son rôle de plateforme majeure de la photographie contemporaine en Afrique.
Créée en 2007 à Lagos, l’African Artists’ Foundation est un espace artistique indépendant et multidisciplinaire, dédié à l’innovation, à la justice sociale et à l’expérimentation. À travers des résidences, expositions et programmes éducatifs, elle favorise une meilleure compréhension de l’art contemporain et des cultures africaines.
Lancé en 2010, LagosPhoto est le premier festival international de photographie du Nigéria. Il rassemble des artistes locaux et internationaux pour interroger l’histoire, les identités et les pratiques culturelles à travers l’image. Avec cette première édition biennale, LagosPhoto affirme plus que jamais sa vocation : faire de la photographie un outil de liberté et de transformation sociale.
