À quelques semaines de l’élection présidentielle prévue le 12 octobre 2025, la scène politique camerounaise prend une tournure inhabituelle, où la religion s’invite avec force dans le débat électoral.
Réunis à Yaoundé pour leur conférence épiscopale, les évêques catholiques ont lancé un appel solennel à la paix et au dialogue. Sans citer directement le président sortant, Paul Biya, au pouvoir depuis plus de quarante ans, plusieurs prélats ont insisté sur la nécessité d’une alternance pour garantir l’avenir du pays.
« Aucun pouvoir n’est éternel, et le Cameroun a besoin d’un souffle nouveau », a affirmé l’un d’eux, invitant les candidats et leurs partisans à respecter le verdict des urnes. Forte d’environ un tiers de la population, l’Église catholique reste un acteur influent dans les moments de tension nationale.
À l’opposé, de nombreux imams et responsables d’associations islamiques ont réaffirmé leur soutien au chef de l’État. Selon eux, la stabilité du Cameroun, dans un environnement régional fragilisé par l’insécurité et les menaces terroristes, repose sur la continuité de Paul Biya.
« Préserver la paix suppose de maintenir le cap actuel », a déclaré un imam de Douala lors d’un rassemblement à la grande mosquée. Ces prises de position confortent la stratégie du camp présidentiel, qui cherche à s’appuyer sur un électorat fidèle, notamment dans les grandes villes.
Jamais une élection présidentielle n’avait autant été influencée par les positions religieuses. Si chrétiens et musulmans vivent généralement en bonne entente, cette polarisation inquiète certains observateurs, qui y voient une instrumentalisation du religieux.
« Les Camerounais doivent voter en citoyens, non en fidèles », a averti un enseignant de l’Université de Yaoundé II.
Âgé de 91 ans, Paul Biya, candidat à sa propre succession, cristallise autant de ferveur que d’oppositions. Le rôle des Églises et des mosquées pourrait s’avérer déterminant dans l’issue du scrutin. Mais beaucoup craignent que cette bataille spirituelle ne fragilise davantage la cohésion nationale.